mardi 26 janvier 2021

Célébration du centenaire du Congrès de Tours 1920-2020 - Table ronde 2

 

Journée congrès de Tours, Tulle 6 février 2021
Table ronde 2 : depuis les années 20, analyse des unions et désunions

Un siècle, 100 ans, que se réunissait, à Tours, le 20eme Congrès de la Section Française de l’Internationale Ouvrière (S.F.I.O.), le 25 décembre 1920.

Le congrès
Nous étions alors deux ans après la fin de Première Guerre Mondiale soit après quatre ans de combats et des millions de morts. Le deuil envahissait les campagnes françaises, les premiers Monuments aux Morts apparaissaient dans chaque commune avec leur longue liste de disparus. « On ne chantait plus dans les champs » me disait ma Grand-Mère qui avait déjà connu la guerre de 1870 marquée par l’annexion de l’Alsace et de la Lorraine au profit de l’Allemagne.

Somme toute, une forte responsabilité pesait sur ce congrès et sur les forces politiques participantes qui n’avaient pas pu, ou pas su, empêcher cette guerre après l’assassinat de Jaurès et la création de « l’Union Sacrée ». Le congrès était sous le poids d’une division fortement suscitée par la Révolution Bolchevique de la Russie tsariste d’octobre 1917. Une pensée politique nouvelle, le Marxisme, trouvait une application concrète dans un vaste pays dominé par un monarchie ancienne et très sévère, le tsarisme. Apparaissait alors une personnalité déjà connue par son adhésion aux thèses révolutionnaires de karl Marx : Lénine

A l’opposé, au sein du Parti Socialiste, se maintenait le courant traditionnel mené par une figure montante du parti Socialiste : Léon Blum

Création de deux partis de gauche
Ainsi se constituait la Gauche Française qui allait marquer la vie politique du pays jusqu’à nos jours à travers la quatrième et cinquième république. Deux partis en constituaient l’essentiel, le parti socialiste (SFIO) et, plus nouveau, le parti Communiste Français (PCF). Une troisième force, le Trotskisme issu d’un autre militant russe Trotski, (en désaccord avec Lénine) faisait aussi, plus discrètement, son apparition.

Cette diversité de la gauche traduit les concepts politiques qui ont distingué ces forces politiques. Si cette gauche est traditionnellement attachée aux valeurs révolutionnaires de la liberté et de l’égalité, elle se distingue par la voie à suivre : faut-il avancer à l’intérieur du système, en l’ajustant à ses marges ou, au contraire le dépasser radicalement pour aller vers la justice ? Le dilemme est installé : adaptation ou rupture ? Il va caractériser la vie politique française et générer des luttes qualifiées de fratricides. Sont-elles réellement fratricides quand une telle distance sépare les protagonistes ? Existe-t-il une plage de recouvrement quand l’un veut la mort du capitalisme alors que l’autre cherche à l’amender ? 

Une situation politique nouvelle : le front populaire
Pourtant une situation politique nouvelle se produisit, l’avènement du « Front Populaire » constitué par l’union des forces politiques de gauche et celle des syndicats. La mobilisation ouvrière impose une issue qui constitue une avancée considérable du droit du travail et reste encore de nos jours un évènement exemplaire. 

Pourtant cette unité ne résistera pas à la naissance et à la croissance du fascisme européen et en particulier de « l’hitlérisme allemand ». Le gouvernement français dirigé par Léon Blum refusera l’aide militaire à la République espagnole menacée par les troupes fascistes de Franco, alliées à la force militaire hitlérienne, provoquant ainsi la rupture politique du Front Populaire. Le parti communiste organisera les « Brigades internationales » qui iront combattre sur le front espagnol. Mais le fascisme gagnera en Espagne et se fortifiera pour engager la deuxième guerre mondiale. La France connaitra une forte agitation politique qui fera apparaître les forces d’extrême droite et mit en avant une personnalité qui allait jouer un rôle dominant : le maréchal Pétain.

La deuxième guerre mondiale
La deuxième guerre mondiale se profile à travers les attaques allemandes à l’est, en Scandinavie et finalement en France. On en connaît le déroulement aboutissant à l’invasion rapide de la France par l’armée hitlérienne et la naissance progressive d’une résistance intérieure, le Maquis s’opposant à « l’Etat Français » dirigé par le maréchal Pétain inféodé aux autorités nazies. Ce fut le temps de la brutalité nazie marquée par les camps de déportation en Allemagne et par une chasse aux familles françaises juives. Ce fut aussi le temps de la construction en Grande Bretagne de la "France Libre" placée sous l’autorité du General de Gaulle. 

La Libération mis en place un gouvernement républicain comptant des ministres socialistes et communistes à côté des « gaullistes » Ce fut un temps d’union et d’une politique sociale innovante (par exemple Lla Sécurité Sociale que nous connaissons aujourd’hui).

Les héritiers du congrès de Tours
Les héritiers du congrès de Tours ne tardèrent pas à se diviser à nouveau notamment au sujet des « guerres coloniales » en Indochine d’abord et en Algérie ensuite. La Quatrième République céda la place à la Cinquième dirigé par le Général De Gaulle. La Constitution que nous vivons aujourd’hui fut adoptée par referendum et nous en connaissons maintenant les caractéristiques antidémocratiques. Elle renforça la rupture au sein de la gauche. Aujourd’hui encore, elle constitue un temps fort de la confrontation politique et un espace de division. On peut rappeler que notre mouvement « Cap à Gauche » s’inscrit fortement dans la bataille pour un nouvelle constitution. 

En fin de propos, force est de constater que la séparation constatée au congrès de Tours perdure et sur des bases déjà présentes à ce congrès historique avec sans doute des partenaires affaiblis pour diverses raisons. Le Parti Socialiste souvent accusé d’avoir trahi la gauche cherche son nouveau nom et le Parti Communiste a perdu, pour des raisons diverses, beaucoup de ses capacités d’intervention. 

Cette dissociation, cet écart considérable, réclame sans doute une réflexion purgée de tentations dominatrices et orientée vers les exigences de démocratie, de justice sociale et de lutte contre les inégalités énormes nationales et internationales. Objectif sans doute difficile mais pourtant totalement incontournable. Et, dans cette optique, il serait une nouvelle fois utile de rassembler ces forces de gauche aujourd’hui augmentées de la vision écologique. 2011 et suite nous y invitent avec insistance ! 

Des rencontres plus ou moins discrètes entre les divers protagonistes n’y suffiront pas si elles se refusent à offrir un modèle de société résolument antagoniste au néo-libéralisme installé au sein d’une Europe toute entière dominée par le capital. 

La responsabilité des partis est en cause ; leur action doit sans doute se moderniser mais elle doit surtout se concrétiser et se rassembler pour élaborer une offre politique à la fois respectueuse de l’humain et porteuse d’un système économique fondé sur l’égalité sociale et sur la répartition équitable des richesses produites par le travail. 

Une telle offre pourrait encore s’appeler socialisme et constituerait un support humaniste au progrès technologique, scientifique et moral. Ce serait alors la meilleure commémoration du congrès de Tours qui puisse être offerte à la France et à l’Europe.

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